Le 24 juillet 2020, le directeur parlementaire du budget (DPB) a présenté un rapport sur les coûts relatifs à la politique du gouvernement consistant à permettre à ses employés d'utiliser le code de congé spécial 699 (Congé payé pour d'autres raisons). En fonction d’une directive du Secrétariat du Conseil du Trésor (SCT), on a permis aux employés de demander un congé de code 699 pour des motifs divers, y compris le fait d'être atteint par la COVID-19, d'avoir à se placer en quarantaine, de ne pas avoir accès à la technologie nécessaire à son travail, ou de devoir prendre soin de personnes à charge.
Notre estimation originale des coûts incluait des données allant jusqu'à la fin de mai 2020 pour 62 des 88 organisations de la fonction publique fédérale régies par les Annexes I, IV et V de la Loi sur l'administration des finances publiques. Par la suite, le gouvernement nous a envoyé des données mensuelles allant de mars à juin 2020 pour 72 des 89 organisations de la fonction publique fédérale, conformément à la demande d’information IR0504 (juillet 2020)[i]. À l’aide de ces données, nous avons publié une mise à jour de l’estimation des coûts le 24 août 2020.
Le gouvernement nous a récemment fourni des données mensuelles allant de mars au 6 septembre dernier pour 84 des 90 organisations de la fonction publique fédérale (voir la note de fin [i] pour une explication à propos du nombre d’organisations par période). Ces 84 organisations représentent 99 % des fonctionnaires employés par le gouvernement en date du 31 août 2020. Pour l'ensemble des semaines, le nombre d'heures utilisées a été révisé par rapport aux données fournies précédemment. On ne sait toujours pas pourquoi certaines organisations fédérales sont incapables de fournir des données.
Comme nous l’avons conclu précédemment, l'utilisation du code de congé 699 continue de décroître (Figure 1‑1). En effet, après avoir atteint un sommet de 1,7 million d'heures pour la semaine se terminant le 5 avril, le nombre d'heures hebdomadaires de congé a baissé de 90 %, pour passer à 168 000 heures dans la dernière semaine du mois d'août. Le nombre d'heures hebdomadaires de congé a légèrement augmenté (d'environ 20 000 heures) pour la dernière semaine de données disponibles (soit la première semaine de septembre). Ceci représente une augmentation de 12 % par rapport à la semaine précédente (30 août), mais tout de même une baisse de 89 % par rapport au sommet du 5 avril.
La figure 1-1 nous permet d’observer une autre donnée intéressante, soit l'augmentation du nombre d'heures la dernière semaine de chaque mois (en fait, la semaine renfermant le dernier jour civil de chaque mois, puisque quelques semaines débordent sur le mois suivant). Ce phénomène semble correspondre au fait que certains employés ou certaines organisations inscrivent tous leurs congés 699 en même temps à la fin du mois. D'ailleurs, le SCT a expliqué au DPB qu'au début de la pandémie, on avait donné aux organisations la directive de saisir leurs congés dans le système des RH tant que l’opération n'aurait pas d'effet négatif sur les priorités opérationnelles, ou ne soumettrait le réseau ou les ressources à une trop grande pression. Ainsi, la légère hausse dans l'utilisation du congé 699 à la dernière semaine de données disponibles (du 31 août au 6 septembre) pourrait s'expliquer de la sorte. Nous avons inclus dans la figure 1-1 une moyenne mobile sur quatre semaines pour mieux représenter ce qu'aurait été l'utilisation hebdomadaire du congé 699 sans cette anomalie de fin de mois.
Ce retard dans l'entrée des données pour les congés 699 se répercute également sur les totaux mensuels présentés dans le tableau 1-1 ci-dessous. En effet, le total mensuel des heures fournies par le SCT correspond à la somme des totaux hebdomadaires pour toutes les semaines se terminant au cours du mois. Par exemple, le sommet de 1,7 million d'heures a été atteint au cours de la semaine du 30 mars au 5 avril, et a été ainsi ajouté au total du mois d'avril. Cependant, un nombre non négligeable d'heures inscrites cette semaine doivent avoir été effectuées au cours de mars (soit les 30 et 31 mars, ou plus tôt au cours du mois) et saisies seulement à la fin du mois. De la même façon, une autre pointe de 1,5 million d'heures s'est produite dans la semaine du 27 avril au 5 mai, mais a été comptabilisée dans le total de mai. On peut probablement en conclure que les coûts présentés dans le tableau 1-1 ont fait l'objet d'une sous-estimation pour mars et d'une surestimation pour mai.
Comme on l'a expliqué dans les rapports antérieurs, le Conseil du Trésor n'a pu fournir les dépenses réelles en personnel pour la période concernée. À l’aide des données sur les dépenses en personnel pour 2018-2019 obtenues par la demande d’information IR0074, le DPB estime à près de 1,1 milliard de dollars le coût des congés 699 pris entre mars et septembre, y compris les pensions et autres avantages sociaux[ii]. Ce calcul inclut une extrapolation par le DPB des coûts pour les ministères pour lesquels aucune donnée n’est disponible. Notons à nouveau que ce coût n’implique pas des dépenses additionnelles pour le gouvernement fédéral; il s’agit plutôt d’un coût en heures de production perdues.
Estimation du coût (en millions de $) |
Nombre d’employés | Dépense moyenne par employé ($) | |
Mars | 160,1 | 60 188 | 2 661 |
Avril | 295,8 | 74 031 | 3 996 |
Mai | 307,4 | 68 542 | 4 485 |
Juin | 142,9 | 46 213 | 3 092 |
Juillet | 97,8 | 31 055 | 3 150 |
Août | 65,4 | 22 200 | 2 947 |
Septembre | 12,0 | 8 619 | 1 393 |
Total | 1 081,5 | 113 362 | 9 540 |
Le coût total figurant au tableau 1-1 représente une augmentation de 31 % par rapport à notre estimation précédente. Compte tenu des données additionnelles sur les ministères qui manquaient dans notre mise à jour précédente, l’estimation des coûts a crû de 10 % par rapport à nos résultats antérieurs au cours de la période du 15 mars au 28 juin (ce qui représente environ le tiers de l'augmentation de 31 %). L'ajout des mois de juillet et août, de même que celui de la première semaine de septembre représente les deux derniers tiers de l'augmentation, soit environ 21 %.
Tel qu’on l’a rapporté auparavant, c’est à l’Agence du Revenu du Canada (ARC) qu’on retrouve la majeure partie des congés 699, soit (en date du 6 septembre) 46 % du coût total depuis le début de la pandémie. Le tableau 1-2 montre les cinq organisations dont le nombre d’heures utilisées par mois est le plus élevé, de même que leur pourcentage respectif du total. La part de l’ARC dans le total des heures utilisées continue de décroître; elle est passée de 77 % en mars à 17 % en août. La plupart des ministères ont atteint un sommet dans le nombre total d’heures en mai, mais comme on l’a vu précédemment, ces chiffres incluent probablement les heures du mois d’avril, saisies en fin de mois. Seuls quatre ministères ont fait état d’un plus grand nombre d’heures en juin qu’en avril ou mai.
Le DPB a demandé une ventilation par ministère des heures par type de congés 699 (congés pour des raisons liées à la technologie, congés de maladie, congés pour des raisons familiales, etc.) L'ARC avait déjà fourni cette information pour la période du 15 mars au 6 juin 2020. Dans sa réponse initiale à notre demande, reçue en juillet, le SCT précisait que seuls les systèmes de deux des 88 ministères et agences possédaient la capacité d'effectuer une ventilation des motifs autorisés pour les « Autres congés payés », et qu'on étudiait les options pour rendre possible une telle ventilation pour d'autres organisations.
Dans la dernière mise à jour des données fournie, il y a maintenant une ventilation par type de congés pour presque tous les ministères pour les mois d’avril à août[iii] . La figure 1-2 ci-dessous présente cette ventilation par mois. En excluant les heures pour lesquelles le motif n'est pas fourni, les limitations de travail formaient le motif principal d'utilisation du congé 699 au début de la pandémie (avril et mai), suivies des soins familiaux. Les mois suivants, les soins familiaux sont devenus le motif principal d'utiliser le congé 699 (représentant entre 27 % et 34 % de tous les congés 699).
Considérations
Comme on l'a fait remarquer précédemment, les données reçues pour la présente mise à jour contenaient des révisions par rapport aux données rapportées auparavant. Le SCT a informé le DPB que les ministères soumettent leurs données à des intervalles irréguliers, et qu'il s'attend à ce que l'utilisation des congés fluctue jusqu'à ce que toutes les organisations aient rattrapé la saisie des données sur les transactions en matière de congés. Entre autres, les données pour la première semaine de septembre (du 31 août au 6 septembre) présentaient presque 20 ministères de moins que les semaines précédentes, et sont donc probablement incomplètes. Maintenant que la deuxième vague de cas de COVID-19 bat son plein, le DPB va continuer à suivre la situation et présenter des rapports sur le coût de l'utilisation des congés 699.
Pour terminer, nous avons indiqué dans les rapports précédents que l’utilisation des congés 699 est probablement sous-reportée dans plusieurs organisations. En effet, dans les plus récentes données fournies par le SCT le nombre total d’heures de congé 699 a été revu à la hausse pour certaines organisations, ce qui confirme que les données précédentes sous-estimaient l’utilisation du congé. De plus, l’ARC avait mentionné qu’une des raisons pour lesquelles elle représentait une part si importante de l’utilisation des congés 699 (mis à part le fait qu’elle est la plus grande organisation fédérale en terme du nombre d’employés), est qu’il y existe une solide culture de déclaration des heures travaillées. Si on s’attarde à la marge intensive (le nombre d’heures de congé utilisé par employé ayant utilisé un congé 699), l’ARC se trouve bien au-dessus de la moyenne dans les mois de mars et avril, puis dans la moyenne en mai et juin, pour finalement se trouver bien en-dessous de la moyenne en juillet et août. Ceci laisse porter à croire que les autres organisations ont sous-reporté les heures de congé dans les premières quatre à six semaines. Toutefois, nous savons que la plupart des employés de l’ARC n’étaient pas équipés pour travailler à distance avant la mi-avril, ce qui explique leur grande utilisation du congé 699. Il est possible que les autres organisations étaient déjà mieux outillées pour que leurs employés travaillent à distance et ainsi ont réellement utilisé moins de congé 699.
Données supplémentaires
[i] Une organisation s'est ajoutée à chaque ensemble de données subséquents fournis par le SCT. La chose semble pouvoir s'expliquer par le fait que certaines organisations étaient regroupées dans les ensembles précédents, tandis qu'elles font maintenant l'objet de rapports distincts. Par exemple, les chiffres pour la Sécurité publique incluaient précédemment le Bureau de l'enquêteur correctionnel du Canada, le Comité d'examen externe de la GRC, et la Commission civile d'examen de traitement des plaintes de la GRC. Chacune fait maintenant l'objet d'une mention séparée dans la mise à jour la plus récente.
[ii] L'estimation du DPB dans le premier rapport (publié le 24 juillet 2020) ne tenait compte que des salaires à un coût moyen de 309 $ par employé par jour. Le coût moyen pour tout le gouvernement, en incluant les pensions, les avantages sociaux et les autres coûts du personnel s'établit à 481 $ par employé par jour et a été utilisé pour estimer les coûts de la mise à jour publiée le 24 août 2020, ainsi que de la présente mise à jour. Dans la présente estimation, on a utilisé les coûts par ministère autant que possible. Les coûts moyens par employé de l'ARC sont inférieurs à la moyenne, ce qui a fait baisser le coût moyen global.
[iii] La ventilation des données pour le mois de mars est moins détaillée, ce qui n'est pas surprenant étant donné le fait que même l'ARC n'a appliqué ces types de codes de congés 699 dans son système de suivi du temps qu'à partir de la première semaine d'avril. On ne sait toutefois pas clairement comment les organisations fédérales ont pu identifier ces heures de façon rétroactive, étant donné, comme on nous en informait, qu'en juillet seul deux ministères avaient des systèmes capables de produire une telle ventilation.